Sur cette page de Novembre,
Christiane Giudicelli nous propose son point de vue quant à l'hiver dans nos régions.
Bonne lecture !
Je voudrais rectifier une idée reçue concernant les camélidés domestiques sud-américains : lamas et alpagas ne sont pas des animaux vivant dans les grands froids !
Ce sont certes des animaux vivant en haute montagne et en grande altitude, produisant de la laine, mais ce ne sont pas des animaux de température extrême.
En effet, bien que vivant à des altitudes avoisinant les 4000-5000 m, lamas et alpagas ne sont pas habitués aux températures très rigoureuses. En Europe, ces altitudes correspondent à un paysage alpin de neiges éternelles (sommet du Mont Blanc : altitude 4810 m). Mais en Amérique du Sud, à des altitudes similaires, nous trouverons des paysages de plateaux herbeux ou de bofedales (touffes d'herbes séparées par de l'eau type marécage ou tourbières). Certaines photographies vont nous montrer ces paysages saupoudrés de neige, mais cette neige fondra dans la journée...
Les montagnes où se rencontrent les lamas et les alpagas au Pérou, Bolivie, Nord du Chili ou de l'Argentine, sont situées entre l'Equateur et le Tropique du Capricorne. Ceci induit que le phénomène de l'altitude est compensé par la latitude de ces lieux. Ainsi, il n'y a pas d'été ni d'hiver, mais une saison sèche et une saison humide. La variation de température va surtout se faire entre le jour et la nuit, tout au long de l'année, passant de - 1°C la nuit, à + 18° - 22°C le jour.
Si nous choisissons d'élever ces camélidés andins, ici en France, nous devons donc faire attention aux changements de température que cela leur impose. Ils ne sont pas armés pour supporter des hivers rudes. En conséquence, il me semble indispensable de leur procurer un abri que nous pourrons fermer la nuit dès que les températures descendent au-dessous de – 2°, voire 0° s'il y a du vent. La journée, nous pourrons les laisser sortir en extérieur, surtout si le temps est ensoleillé.
Lamas et alpagas peuvent apprécier d'être dans la neige, mais doivent pouvoir rentrer au sec dès qu'ils en ont envie, où ils pourront se coucher et s'installer à ruminer.
Nous veillerons à l'eau : je crois très important de ne pas leur laisser l'eau froide, après avoir cassé la glace. Pourquoi ? En fait, lorsque nous cassons la glace, l'eau reste à température très basse et regèle souvent très vite. Les lamas n'auront pas bu correctement : lorsque l'eau est froide, ils boivent moins (trop froid donc pas agréable), et moins longtemps (cela gèle trop vite, ils ne pourront pas y aller aussi souvent qu'ils en auraient besoin). Ils n'auront donc pas bu autant qu'ils auraient dû.
A mon avis, l'idéal – lorsque nous avons un nombre important d'animaux qui justifie l'investissement - est l'installation d'abreuvoirs chauffants (abreuvoirs à niveau constant, avec résistance chauffante). Dans le cas contraire, je pense raisonnable :
- de leur porter un seau d'eau à 10-15° le matin (plusieurs seaux si beaucoup d'animaux),
- de venir vérifier au moins deux fois dans la journée qu'il y a toujours de l'eau et de la renouveler si besoin. Ainsi, chaque lama aura eu le temps de venir boire à volonté.
- le soir, nous viderons l'eau restant dans les seaux (ainsi, pas de glace à casser le lendemain matin).
Il est nécessaire également de leur procurer une nourriture adaptée à leurs besoins :
- foin à volonté,
- attention à l'herbe trop froide qui donne des diarrhées (donc éventuellement limiter l'accès aux grands parcs),
- selon le niveau d'engraissement et les besoins physiologiques de chacun : complémentation individuelle en granulé ou orge (pas de blé, déconseillé pour les lamas et alpagas).
Pour la distribution du foin : veiller à ce que tous les animaux puissent manger en même temps : ainsi, même les plus faibles auront accès au râtelier dès qu'ils en auront envie. Pour se faire, prévoir des râteliers sur une longueur minimum de 1m par animal (exemple : 10 animaux = 10 m de râtelier).
Si vous avez choisi de mettre des balles rondes, vérifiez chaque jour que le foin est facile à tirer par les petits camélidés. En effet, dans ces balles rondes, le foin est souvent très compressé et les lamas ou alpagas avec leur petite bouche fine ne pourront pas tirer sur le foin pour manger. L'éleveur risque encore de se faire surprendre, en trouvant qu'il reste beaucoup de foin. Ses animaux n'auront tout simplement pas mangé car ils n'arrivent pas à saisir la nourriture.
En ce qui concerne le granulé ou le grain, il est important de le donner de façon individuelle à chaque animal qui en a besoin : sinon, encore une fois, les plus faibles n'y auront pas accès, ils se feront chasser par les plus robustes ou dominants. De plus, si les lamas ou les alpagas se bousculent pour manger, ils vont cracher et ne mangeront pas l'aliment souillé. L'éleveur, voyant qu'il reste du granulé au fond du seau, risque d'en déduire que ses animaux ont eu assez. Erreur : ces derniers n'en veulent plus tout simplement parce que le grain sent le crachat.
Si le froid est vraiment intense, nous pourrons voir certains animaux trembler : n'hésitons pas à les rentrer, et pourquoi pas, à leur mettre une couverture.
Vous trouverez un article sur l'hypothermie dans le livre "Lamas et Alpagas, les connaître, les élever" page 74 (1ère édition) ou page 76 (2ème édition).